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Hôtellerie restauration la semaine de quatre jours,

une solution pour remédier au manque d’attractivité ?

Depuis plusieurs mois, la semaine de quatre jours est expérimentée dans plusieurs pays d’Europe mais aussi dans certaines entreprises françaises. Cette solution peut-elle s’imposer dans les années à venir ?

C’est une idée qui progresse timidement, mais sûrement, notamment depuis la crise du Covid. Et si les entreprises réinventaient leurs modalités de travail ? Face à la demande accrue des salariés de pouvoir de profiter de temps pour soi, ou à la généralisation du télétravail, le concept de semaine de quatre jours a de plus en plus d’adeptes.

En Europe, les expérimentations à plus ou moins grande échelle se multiplient, avec pour objectif de trouver un modèle gagnant-gagnant, aussi pour les entreprises que leurs salariés. Mais comment mettre en place ce système ? « Il y a deux modèles. Une compression des 35 heures sur quatre jours ou alors une réduction du temps de travail avec une semaine de 32 heures », explique Thérèse Rabière, économiste et vice-présidente du conseil scientifique du Cnam (Conservatoire national des arts et métiers).

« La semaine de quatre jours deviendra la norme du 21e siècle »

C’est vers ce second modèle que se tourne la majorité des études et expérimentations menées dans plusieurs pays d’Europe de l’Ouest. Royaume-Uni, Espagne, Allemagne ou Portugal ont lancé des expérimentations à plus ou moins grande échelle. En France quelques entreprises ont également fait le choix de passer à la semaine de quatre jours.

Un changement de paradigme pour le monde du travail qui s’est fait notamment sur des opportunités. « Plusieurs entreprises ont mis ce système en place pour faire des économies d’énergie à l’automne dernier. Avec un impact positif sur le bien-être des salariés », détaille Thérèse Rabière. Reste à savoir si ces dernières feront le choix de pérenniser leur système.

« Globalement, le taux d’acceptation de la semaine de quatre jours est très élevé. Il oscille entre 80 et 90 % dans toutes les entreprises étudiées », abonde Pedro Gomes, économiste et chercheur à l’université Brickbeck de Londres.

Question d’attractivité

Au Royaume-Uni, 90 % des entreprises qui ont fait l’essai de la semaine de quatre jours souhaitent la maintenir. « 13 % des salariés interrogés indiquent qu’ils ne quitteraient jamais ce mode d’organisation du travail, même si on augmentait leur salaire de plus de 50 %. » Et plus de la moitié estime qu’il leur faudrait au minimum une augmentation de salaire « d’au moins 25 % pour retourner à cinq jours de travail hebdomadaire. »

Une baisse du temps de travail hebdomadaire sans baisse de salaire qui peut poser problème aux chefs d’entreprise. Pourtant, les gains seraient bien supérieurs. « Les entreprises qui ont mis en place la semaine de quatre jours semblent bénéficier d’une plus grande attractivité sur le marché de l’emploi », estime Pedro Gomes.

Ainsi, dans les secteurs en tensions, comme l’industrie ou l’hôtellerie-restauration, la semaine de quatre jours pourrait permettre de combler le manque de main-d’œuvre. « En Espagne, la chaîne de restauration La Francachela a instauré la semaine de quatre jours dès 2021. Et a adopté une nouvelle organisation. Le résultat est concluant et l’entreprise a observé un grand bénéfice en termes de ressources humaines », détaille Pedro Gomes.

Solution contre l’absentéisme

En effet, cette réorganisation, si elle a impliqué d’embaucher plus de salarié, a permis de réduire drastiquement les absences au travail. Ainsi, « le coût du recrutement est inférieur aux coûts causés par un fort absentéisme, problème récurrent de ce secteur ».

Et permet ainsi esquiver un effet boule de neige avec des démissions en chaîne. Aussi, cela permettrait d’augmenter la productivité horaire des salariés sur place. « Au-delà d’un certain temps hebdomadaire, on a remarqué que la productivité horaire diminuait », explique Thérèse Rabière.

La semaine de quatre jours permettrait une plus grande efficience, « mais uniquement à condition d’un changement profond et réfléchi des organisations », selon Pedro Gomes. Une modification de la pensée qui doit s’appliquer à tous les niveaux d’une entreprise.

Et qui pourrait s’imposer à grande échelle dans les années à venir. « L’histoire démontre que l’on va vers une réduction du temps de travail. La semaine de quatre jours sera la norme du 21e siècle. » Et comme pour la semaine de cinq jours, cela pourra s’imposer « si la demande vient des entreprises. » Avant de devenir la règle ?

Source: La Nouvelle République