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Manque de personnel dans la restauration :

” la jeunesse veut des soirées, des week-ends et jours fériés…”

Signe des temps, depuis la crise sanitaire, les restaurateurs ont de plus en plus de mal à trouver du personnel. Ce restaurateur du Médoc en Gironde témoigne. Il a dû passer une annonce proposant divers types de contrats, permettant notamment de travailler 3,5 jours par semaine et un week-end sur deux.

“Aujourd’hui, la restauration doit s’adapter, doit changer” Claude Broussart, directeur du Saint-Julien, semble être résigné et faire avec ce nouveau visage du marché de l’emploi dans la restauration.
Il est le chef de son établissement, indépendant, dont il est propriétaire depuis 27 ans. Autant dire que ce n’est pas la première saison, ni les premières embauches, mais désormais : “il faut s’adapter” 

J’ai 59 ans. J’ai connu pendant 45 ans la restauration différemment”. Lui aussi estime que la crise sanitaire a changé les mentalités.

“Aujourd’hui, la jeunesse veut des soirées, des week-ends, jours fériés.” alors que “pour nous, c’était le travail avant tout ! Certains veulent s’impliquer. D’autres veulent une vie sociale et culturelle à côté, ce qui peut se comprendre aussi“.

Dans son restaurant gastronomique, il explique que ce type d’embauche ne concerne pas “les cadres”. Il cherche à compléter son équipe pour la saison et passer de 14 à 20 employés. Il espère pouvoir ainsi embaucher suffisamment pour ouvrir sept jours sur sept car, depuis le covid, il a dû fermer deux jours par semaine.

Mais la tâche s’avère bien plus compliquée que les années précédentes. “Avant, on avait les étudiants qui ne reprenaient pas avant octobre qui venaient.”
Ceux-là (notamment des écoles de commerce), “on ne les voit plus”. Selon lui, “aujourd’hui, on a deux jeunesses : une jeunesse impliquée, investie dans notre métier (…) et on a une jeunesse qui vient chercher un boulot, mais qui veut aussi avoir des loisirs à côté”.

Trois jours et demi

Il dit comprendre ce changement et c’est pourquoi il a cherché à adapter ses propositions d’embauche, avec de nouveaux contrats à 3,5 jours et un week-end sur deux travaillés. “On a plusieurs vitesses chez nous. Ceux qui veulent faire 5 jours en 43 heures pour gagner plus d’argent, ceux qui veulent faire 39 heures et ceux qui veulent faire 3 jours et demi en 35 heures. Donc, on a un pouvoir d’achat différent. Certains me disent : je préfère avoir moins de sous, plus de libertés. D’autres qui veulent plus d’argent parce qu’ils sont une famille à faire vivre. Les deux s’entendent et se comprennent!”.

Bientôt sexagénaire, il porte également un regard différent sur sa profession :“Est-ce qu’aujourd’hui, c’est bien de ne pas voir ses enfants ou ses petits-enfants ? Nous, les gens de près de soixante ans, ça a toujours été le travail qui primait.  On a pu créer un capital”.

C’est également, une autre façon de s’engager dans la profession. Certains ne souhaitent pas forcément s’engager dans un emploi sur le long terme : “parfois, ils ne veulent pas un CDI mais un CDD. On leur dit, c’est pas un mariage, on travaille ensemble, on est sous contrat”.

Depuis l’annonce, il pense pouvoir embaucher trois personnes mais continue de rechercher pour son établissement de Saint-Julien-Beychevelle, dans les vignobles réputés du Médoc.

Chacun tente de trouver des solutions

En attendant, cette difficulté de recrutement est partagée par l’ensemble de la profession quels que soient la taille et le standing de l’établissement. Quand Claude Broussart en parle avec ses collègues, ils disent : ” Ne va pas trop loin Claude, parce que nous on est pas sûrs de pouvoir suivre!”

Aussi, quant au personnel formé et qualifié, “les jeunes de la profession qui sont brillantissimes” selon lui, disent : on veut bien travailler, qu’est-ce que vous nous proposez ? Quels sont les avantages? Qu’est ce qui fera que je vais retenir votre maison?”

Pour Franck Chaumès, président de l’UMIH Gironde, “aujourd’hui tout le monde s’adapte. On essaie chacun de proposer des solutions“. 

L’emploi du temps est de plus en plus revu et partagé et les restaurateurs essaient de trouver des incitations soit financières soit d’aménagement du temps pour améliorer les conditions de travail. Une chose est sûre, un retour à la vie d’avant en restauration n’est plus à l’ordre du jour.