Sobriété énergétique : comment les restaurateurs se préparent à passer l’hiver
Alors que le prix de l’électricité s’envole, la Première ministre, Elisabeth Borne, a demandé aux entreprises un plan de sobriété, en vue de possibles rationnements cet hiver. Dans la restauration, les économies sont une affaire de survie.
L’heure est à la “responsabilité collective“. C’est le message qu’a souhaité faire passer la Première ministre Elisabeth Borne, dans son discours devant le Medef lors de la rencontre des entrepreneurs de France (REF) organisée par le syndicat patronal ce lundi 29 août. Une responsabilité sur les questions énergétiques, avec deux objectifs en ligne de mire : limiter les dépenses, et faire un geste écologique.
Car le prix de l’électricité sur le marché de gros pour 2023 s’est envolé, passant à 1 000 euros le mégawattheure contre 85 euros un an plus tôt. En cause : le tarissement des acheminements de gaz russe, qui alimente de nombreuses centrales européennes, et l’arrêt de nombreux réacteurs nucléaires en France à cause de la corrosion. Selon le gouvernement, les prix continueront d’être plafonnées à 4% jusqu’à la fin de l’année… et après ?
“On ne peut pas attendre que les entreprises encaissent“
Cette perspective inquiète les entreprises, notamment dans le secteur de la restauration. Dans le Loiret, l’union des métiers des industries de l’hôtellerie s’inquiétait début août de la viabilité des établissements, et d’une potentielle nécessité pour eux de fermer certains jours de la semaine pour économiser l’énergie.
Sabine Ferrand le confirme : les factures d’énergie, c’est pour elle “minimum un billet de 15 000 par an“. Restauratrice et gérante du Rhinocéros à Saint-Laurent-Nouan, en Loir-et-Cher, elle est la présidente régionale de l’Umih, ainsi que de la délégation dans le 41. Alors forcément, avec les prix qui continuent d’augmenter : “Je ne sais pas à quelle sauce je vais être mangée, les communications d’EDF restent vagues.“
Pour l’instant, le gouvernement n’annonce pour 2023 que des aides pour les particuliers. Des aides ciblées à destination des plus modestes pour remplacer le plafonnement des prix, que Sabine Ferrand aimerait aussi voir arriver dans les poches des entreprises pour les aider à entreprendre des rénovations énergétiques et autres travaux pour moins consommer. “On devrait tous avoir des panneaux solaires pour son ballon d’eau chaude, estime-t-elle. On ne peut pas attendre que les entreprises encaissent, comme elles ont encaissé la crise sanitaire“.
Petits gestes, mis bout à bout
Selon le site internet d’Engie à destination des professionnels, la facture annuelle moyenne d’un restaurateur est de 3 300 euros pour l’électricité. Une facture qu’il est possible de diminuer fortement, en jouant sur les processus de cuisson et de production de froid. Utiliser des couvercles sur les casseroles permet ainsi d’économiser 75% d’énergie, quand les plaques à induction réduisent la consommation d’électricité de moitié.
Sabine Ferrand, de son côté, a inscrit l’économie et “les bons gestes” dans sa culture d’entreprise :
“On allumait la clim et la lumière à 9h, maintenant seulement quand les clients arrivent. Quand on quitte une pièce, on éteint la lumière, on a mis des minuteries dans les toilettes, et on a remplacé toutes les ampoules par des Led.”
Sabine Ferrand, présidente Umih CVDL/41 et restauratrice
Côté production du froid aussi, les habitudes ont changé. Ses employés ont ainsi pris l’habitude de “ne pas surcharger les chambres froides pour ne pas les faire peiner“. L’entretien est aussi renforcé, pour éviter “les blocs de glace” qui, comme dans un congélateur en manque de dégivrage, surconsomme dans les grandes largeurs. “Ce sont des petits gestes mais, mis bout à bout, ils changent beaucoup de choses.” La restauratrice estime ainsi pouvoir économiser “presque 40%” de sa facture d’électricité avec toutes ces mesures d’appoint.
Plans de sobriété
Ces mesures, ses collègues de l’industrie de la restauration “n’auront pas tellement le choix d’appliquer“, dans la logique de “fin de l’abondance” prophétisée par le président de la République. Car “on est tous en train de se dire qu’il faut limiter l’inflation, ne pas augmenter nos tarifs, mais on va bien devoir augmenter à un moment“, redoute Sabine Ferrand. En cause : “Les économies à faire sur l’eau, le gaz, et toutes les matières premières, le poisson est hors de prix, et l’huile je ne vous dis pas“, liste la présidente de l’Umih du Centre-Val de Loire. “Ça nous pousse à acheter mieux.“
Côté économies d’énergie, Elisabeth Borne a annoncé ce 29 août devant le Medef que des “plans de sobriété” seraient demandés aux entreprises dès le mois de septembre, servant à évaluer leurs capacités à réduire leur consommation. “L’heure n’est plus aux demi-mesures, l’heure n’est plus au chacun pour soi“, a ajouté la Première ministre, évoquant la possibilité de mesures contraignantes quand au non-respect de telles mesures d’économie.
Car économiser, c’est éviter les coupures, “préserver le réseau et s’assurer qu’on peut tous travailler sereinement“, plaide Sabine Ferrand. Pour y arriver, “chaque entreprise et chaque particulier doit prendre ses responsabilités“. Sans quoi une politique de rationnement pourrait être mise en place cet hiver, prévient le gouvernement.
Source: France 3